ÉGINE. – Kolona - 2002
Néolithique - Néolithique Récent
Âge du Bronze - Bronze Ancien - Bronze Moyen - Bronze Récent
Antiquité - Archaïque - Classique - Hellénistique - Romaine
Égine, Aigina, Aegina
Les fouilles de Kolona se sont poursuivies en 2001 sous la direction de F. Felten et S. Hiller (université de Salzbourg). Les principaux objectifs de la campagne étaient : 1) de terminer les recherches dans l'habitat préhistorique à l'Est du temple (fouilles anciennes de G. Welter) ; 2) de nettoyer et préparer une zone adjacente qui permette d'étudier la fin de l'HM ; 3) de recueillir des indices chronologiques susceptibles de dater les maisons dites « des prêtres » dans la partie orientale du versant Sud de l'acropole.
1) Habitat préhistorique. — Les travaux commencés en 1999 (v. BCH 124 [2000] Chron., p. 790) dans les maisons 18 et 19 ont été achevés. Il s'agissait principalement d'étudier les couches encore en place dans la zone de la maison 19. Les fouilleurs ont dégagé ce qui restait de la couche de l'HA II dans le secteur Ouest, où ils avaient déjà repéré les vestiges d'un grand bâtiment HA II en 1999. Deux murs perpendiculaires ont été découverts, dont l'alignement correspond à l'orientation générale des édifices de l'HA II. D'après leur épaisseur, ils devaient appartenir à un bâtiment à deux étages. Des fragments de tuiles suggèrent que l'on est en présence d'un nouveau grand bâtiment de la période HA II couvert d'un toit. On a également repéré les restes d'un sol blanc dans la coupe de la maison 18. Il était recouvert d'une couche de destruction très dure et compacte, provenant peut-être de la dissolution de briques crues. Des tessons de grands récipients de cuisine et de quelques assiettes plates caractéristiques ont été retrouvés sur le sol. Les fouilleurs ont pu constater que le grand bâtiment avait été consolidé, avant sa destruction, par des murs (retrouvés au Nord et au Sud de la maison 18) construits le long des murs préexistants. Les restes d'un sol plus ancien de l'ΗΑ II ont été repérés au Sud de la maison 19.
Il n'y a pas de transition entre le sol HA II et la couche néolithique sous-jacente. Comme ailleurs, on a retrouvé des restes de fondations constitués d'une rangée de pierres rectiligne ou curviligne, sans pouvoir cependant distinguer de structures cohérentes. La couche contenait uniquement de la céramique NR allant peut-être jusqu'à l'ΗΑ I.
2) En nettoyant la zone adjacente (non fouillée par G. Welter) dans la perspective d'étudier l'ΗΜ tardif, on a trouvé en surface de la céramique d'époque tardo-romaine et du début de l'époque chrétienne. Un sondage montre que les couches HM commencent immédiatement au-dessous.
3) Dans la zone des maisons dites « des prêtres », sur le versant Sud de l'acropole, des sondages ont été implantés sur 3 niveaux distincts (« terrasses B, C et D »). Dans ce secteur, les datations des constructions d'époque historique et des vestiges de l'habitat préhistorique ont été confirmées.
Pour la datation des maisons dites « des prêtres », le matériel provenant de puits scellés par des sols qui contenaient de la céramique de la fin de l'époque archaïque a livré des informations importantes. Les reconstructions et le matériel d'autres puits attestent une occupation qui se prolonge jusqu'à la fin de l'époque classique au moins. À signaler des aménagements en forme de bassins et de fosses peut-être destinés à un usage cultuel. À l'époque hellénistique, ces bâtiments furent couverts par le mur d'enceinte. Une conduite d'eau munie de regards orientée d'Est en Ouest au pied de l'acropole date sans doute de cette même époque ; elle est construite en matériaux de remploi et traverse des vestiges de bâtiments de la fin de l'époque classique. Des restes de constructions d'époque préhistorique sont présents sur toutes les terrasses. Il faut signaler, sur la terrasse B, un puits de plus de 8 m de profondeur et dont le comblement a livré ca une tonne de céramique de la fin de l'HM. Sur les terrasses B et C, on a retrouvé une grande quantité de céramique mycénienne en relation avec des murs de soutènement qui s'enfonçaient profondément dans le sol. Elle témoigne d'une occupation continue de cette zone jusqu'à la fin de l'HR IIIB. Quelques tessons appartiennent à l'HR IIIC. Parmi la céramique peinte figurée on signale un fragment de cratère avec une représentation de lynx. La présence de cet établissement mycénien, repéré pour la première fois dans cette zone, ne peut s'expliquer que par l'existence d'une ville basse qui s'étendait jusqu'au port, au pied de l'établissement de l'acropole.
— En 2002, les travaux ont porté sur des zones fouillées par G. Welter avant la guerre et par H. Walter dans les années 1980 (fouilles inédites), ainsi que sur un nouveau secteur reliant les zones déjà fouillées (fig. 1). Il s'agissait, dans l'ordre : 1) de dégager et faire le relevé complet d'un complexe de bâtiments situé à l'extrémité occidentale du cap Kolona, que G. Welter avait proposé d'identifier comme l'« Attaleion » ; 2) de continuer l'étude de la ville intérieure préhistorique, dégagée en grande partie pendant les fouilles d'avant-guerre, mais fortement détruite depuis ; 3) d'ouvrir un nouveau chantier de fouilles sur la colline dite « du Sud », qui fasse le lien entre les fouilles de H. Walter dans l'enceinte fortifiée préhistorique et la « ville intérieure » ; 4) de faire des sondages à l'angle Sud-Est de l'acropole, dans le secteur des maisons dites « des prêtres » fouillées il y a longtemps par H. Walter.
1) Le bâtiment situé à la pointe occidentale du cap Kolona est un complexe architectural de la fin de l'époque archaïque, très proche par le plan et la technique de construction des maisons dites « des prêtres » de l'angle Sud-Est de l'acropole (fig. 2). L'ensemble est constitué de petites pièces couvertes et de cours apparemment à l'air libre, dont les parois sont construites en orthostates de poros soigneusement travaillés surmontés de murs de briques crues. On peut déduire des nombreux objets votifs qui y ont été retrouvés — skyphoi et lécythes miniatures, fragments de récipients en albâtre, terres cuites et céramique d'importation d'excellente qualité (fig. 3) — qu'il s'agissait d'un lieu sacré. Cela confirmerait l'hypothèse de Welter, qui avait proposé d'identifier ce complexe comme un sanctuaire de phratries, sur la base d'une inscription gravée sur un des nombreux couvercles de fosses à offrandes qu'il y avait découverts (un nouvel exemplaire a été trouvé dans une couche de destruction). Les réfections visibles sur les sols et les murs attestent que ce complexe conserva sa fonction jusqu'à une phase avancée de l'époque classique. L'affinité structurelle et matérielle entre cet ensemble et celui des « maisons des prêtres » permet de supposer qu'aux époques archaïque et classique, le versant Sud de l'acropole fut principalement occupé par des constructions à caractère sacré. Ce n'est qu'à l'époque hellénistique qu'un changement décisif apparaît. La zone Sud du complexe architectural est abandonnée, puis comblée avec les briques crues des anciens murs et recouverte d'un sol en pierres de remploi. Au même moment, un nouveau bâtiment est construit en matériaux de remploi et en moellons au Nord du complexe, sur l'ancienne structure en orthostates, mais avec une orientation légèrement différente. Il reprend le schéma des bâtiments abandonnés au Sud (deux chambres couvertes et une cour à l'air libre), mais en le transposant dans l'espace occupé à l'origine par la cour. Aucun indice nouveau ne permet d'identifier ce bâtiment (pas de tuiles à monogrammes d'Attale comme celles qui avaient conduit Welter à y voir l'« Attaleion »), mais le fait que la nouvelle structure reprenne le plan de l'ancienne suggère qu'il conserva la même fonction. La datation est fournie par le matériel recueilli sous les remblais du sol dallé. Il s'agit principalement de céramique West-Slope du début de l'époque hellénistique, de lampes à épaule arrondie et de céramique à reliefs de la première période, de sorte qu'une datation à la fin du IIIe s. - début du IIe s. av. J.-C. — et donc une relation avec l'acquisition d'Égine par Pergame — est plausible. Le nouvel édifice fut en usage pendant une longue période, comme l'attestent des tessons de la fin de l'époque hellénistique retrouvés entre les pierres utilisées pour réparer le sol lors de la pose d'une conduite en tuiles laconiennes.
2) En 2002, les recherches dans le secteur de la ville intérieure préhistorique ont été définitivement terminées. L'ensemble de la zone a été remblayé à un niveau correspondant au début du BM et les murs encore en place ont été consolidés, pour que les visiteurs aient une vision claire d'un établissement du BM planifié de façon unitaire avec un réseau de rues droites orientées d'Ouest en Est (fig. 4).
On a également vidé une citerne conservée sur ca 5,30 m de haut au Sud-Est de la zone, construite en petits blocs de poros et revêtue à l'intérieur d'un mortier hydraulique finement dégraissé de pouzzolane naturelle. Il est impossible de préciser sa datation, mais elle est antérieure à l'époque hellénistique, car les fondations d'un bâtiment rectangulaire hellénistique en matériaux de remploi construit immédiatement à l'Est empiètent légèrement sur elle. À l'intérieur, la citerne présente 3 compartiments de ca 3 m de long sur 2 m de haut orientés dans trois directions : Est, Sud et Nord. Ces compartiments furent sans doute creusés comme des galeries, car les dalles de poros qui les recouvrent, que l'on a dégagées dans le cas du compartiment Nord, s'engagent sous un tronçon de mur préhistorique. Le compartiment Sud présente des signes évidents de restauration, car il est revêtu d'une couche d'opus signinum contenant une forte proportion de pouzzolane artificielle, qui fut utilisé en Grèce à partir de la fin du IIIe s. av. J.-C. Les récipients trouvés au fond de la citerne — deux petites amphores à fond plat et plusieurs grandes amphores de stockage — attestent qu'elle fut en usage jusqu'à l'époque protobyzantine.
3) L'ouverture d'un nouveau chantier sur la colline dite « du Sud », où A. Furtwängler avait retiré les constructions tardo-romaines et byzantines, mais où ni lui, ni G. Welter n'avaient jamais réalisé de véritables fouilles, avait un double but : a) unir l'ancien secteur de fouilles de G. Welter (la « ville intérieure ») à la ceinture fortifiée de l'Âge du Bronze dégagée par H. Walter/F. Felten ; b) obtenir une stratigraphie et une chronologie détaillée et continue du BM, qui manque encore pour Kolona. C'est par ailleurs dans cette zone que se trouve la partie Sud du « bâtiment en grosses pierres », qui était probablement le siège de l'autorité locale.
Dans les couches supérieures perturbées, on n'a retrouvé dans tout le secteur que de modestes restes de l'occupation tardo-romaine. En revanche, la découverte d'une large bande de blocs de poros brisés et réutilisés, à l'Est et dans l'axe de la façade du bâtiment rectangulaire, est d'une grande importance pour la topographie de l'acropole hellénistique. Il s'agit certainement des fondations d'un autel qui allait avec ce bâtiment et le définit donc comme un bâtiment de culte. Sa datation repose sur la céramique découverte dans les tranchées de fondation (céramique à vernis noir et West Slope, mais aussi bols à reliefs et fragments de terres cuites). Juste au-dessous des vestiges d'époque hellénistique de la « colline Sud » commencent les couches du BM, parfois perturbées par l'occupation d'époque hellénistique ou postérieure.
Les couches archaïque, géométrique et mycénienne font totalement défaut. Il est frappant de constater que les murs et les sols BM sont recouverts par une couche compacte de briques crues. On ne sait pas encore s'il s'agit des restes de parois écroulées ou d'une couche créée intentionnellement. Les trouvailles de céramique (productions d'Egine, matt painted et importations crétoises) datent ces couches d'une phase tardive du BM. Il faut signaler parmi les découvertes importantes de cette campagne le dégagement partiel d'un four de potier du BM construit dans la zone Sud du « bâtiment en grosses pierres » ; ce dernier édifice fut lui-même réaménagé plusieurs fois.
4) En 2002, après avoir constaté que les constructions préhistoriques dans le secteur des maisons dites « des prêtres » se prolongeaient le long du versant Sud en direction de la mer, on a ouvert deux sondages pour obtenir des indications plus précises sur le caractère et la date de ces vestiges. On a constaté que des terrasses construites avec des murs de soutènement avaient été aménagées pour augmenter la surface habitable, ce qui a confirmé l'existence d'une ville préhistorique qui s'étendait jusqu'au port. Un autre sondage situé un peu plus au Sud-Est a livré des indications chronologiques importantes. On a trouvé au-dessus d'un sol une épaisse couche d'occupation, qui contenait un riche matériel mycénien : céramique peinte monochrome rouge et noire et céramique de cuisine, très nombreux tessons de gobelets et de kylix, quelques cratères, ainsi que des fragments d'idoles et le fragment d'un bol à engobe blanc d'importation chypriote. Le matériel mycénien date de la phase HR IIIA1-2 et révèle un contexte stratigraphique chronologiquement homogène. Pour préciser l'extension et la structure de la ville basse, on réalisera des prospections géomagnétiques dans ce secteur en 2003.
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