DIKILI TASH - 2017
Informations Générales
Numéro de la notice
8786
Année de l'opération
2017
Chronologie
Mots-clés
Nature de l'opération
Institution(s)
Localisation
Toponyme
Dikili Tash
Dikili Tash
Notices et opérations liées
Description
À Dikili Tash, P. Darcque, H. Koukouli-Chryssanthaki, D. Malamidou et Z. Tsirtsoni ont mené en 2017 une nouvelle campagne d’étude dont l’objectif était de poursuivre l’étude des données issues des fouilles récentes et de préparer les publications. Parmi ces dernières, le volume de synthèse présentant toutes les recherches effectuées à Dikili Tash entre 1986 et 2017 sera terminé à la fin de l’année 2017. Trois dossiers ont apporté des résultats d’un grand intérêt scientifique : l’étude des fragments architecturaux de la maison 4 du secteur 6, l’identification d’un nouveau vase décoré à l’or, et les analyses isotopiques des restes végétaux et des ossements d’animaux.
La maison 4. - Comme en 2016, deux dossiers architecturaux ont été particulièrement étudiés cette année. Ils touchent deux des édifices néolithiques du secteur 6 : la maison 4, à l’Est (fouilles H. Koukouli-Chryssanthaki 1989-1996), et la maison 1, à l’Ouest (fouilles 2008-2013), respectivement étudiées par Paul Bacoup et Sandra Prévost-Dermarkar.
Dans la maison 4, l’étude s’est concentrée sur les fragments tombés dans la partie Nord-Est de la pièce A. Elle s’intéresse plus particulièrement aux pièces de bois utilisées dans la construction. Ainsi chaque pièce de bois est étudiée selon trois critères : la partie naturelle d’origine, le type de pièce et la fonction architecturale de la pièce.
La technique principale de construction des murs est celle du torchis sur poteaux jointifs. D’après les données disponibles, le faîte des murs devait atteindre une hauteur comprise entre 1,70 et 1,80 m. La terre à bâtir est utilisée de deux manières différentes, comme torchis et comme enduit. Les poteaux sont constitués de rondins ou de perches dont les diamètres sont compris entre 3 et 13 cm et qui ont pu être, ou non, refendus une ou plusieurs fois. Des perches, petites et grosses, sont utilisées en traverses, perpendiculairement aux poteaux (fig. 1).
On situe l’ouverture vers l’extérieur de la pièce A dans le mur Est, en se fondant sur le fait qu’aucun des autres murs dont les bases sont conservées ne présente d’interruption. Cette hypothèse trouve maintenant des arguments dans l’étude des fragments architecturaux. Le fragment 611010-003 fait partie des plus imposants et des mieux conservés avec une hauteur de 53,5 cm et une largeur de 42 cm pour une épaisseur de 10,3 cm (fig. 2). Il appartient probablement au parement externe du mur Est. Il présente neuf empreintes de pièces de bois verticales comme horizontales et deux ensembles d’empreintes de ligatures entre les pièces de bois (fig. 3). Parmi les empreintes, sept sont à orienter plus ou moins verticalement dont six sont des poteaux de l’armature générale de la maison en poteaux jointifs. Les pièces de bois utilisées pour ces poteaux avaient un diamètre originel compris entre 5 et 13 cm. Quant aux pièces de bois horizontales, on a une perche et une pièce équarrie. Un rebord de l’empreinte présente un profil plat et forme un angle franc et presque droit avec la surface plane de l’empreinte. En reconstituant alors les pièces de bois, la pièce équarrie s’apparente rapidement à un linteau reposant d’un côté de l’ouverture sur trois poteaux qui en forment un des jambages.
Cette étude, qui se poursuivra durant les prochaines années, apporte d’ores et déjà une vision plus précise de l’organisation architecturale de la maison 4, notamment l’existence probable d’une étagère ou d’une mezzanine courant tout le long du mur Ouest de la pièce A et permettant d’utiliser l’espace au-dessus du four, pour y ranger du mobilier par exemple, ou pour y dormir (fig. 4).
Un vase de la maison 1 décoré à l’or. - Les études concernant la céramique, coordonnées par D. Malamidou et Z. Tsirtsoni, ont porté d’une part sur les vases décorés au graphite, afin de préparer un projet post-doctoral porté par Silvia Amicone, d’autre part sur les vases de cuisson, en collaboration avec Anastasia Dimoula, dans le cadre du projet PlantCult.
Cependant, en effectuant un nouvel examen du vase 6163-009, dont le relevé graphique ne paraissait pas satisfaisant, D. Malamidou a identifié un vase décoré avec de l’or. Le vase en question (fig. 5), totalement conservé (h. 13,3 cm ; diam. max. 15 cm ; diam. de l’ouverture 12,5 cm), est un bol à profil sinueux, dont les surfaces ont été très altérées par des concrétions et probablement par une exposition au feu. Il comporte deux paires de trous de réparation à différentes hauteurs de la paroi.
Malgré ce mauvais état de conservation, on discerne un décor de triangles curvilignes opposés, peints avec une peinture à base d’oxydes de fer. Ce décor s’apparente à celui des vases « brown-on-cream ». Le vase appartient à un groupe d’objets en place sur le sol de la maison 1 du secteur 6, parmi lesquels figure une amphore intacte décorée au graphite. La date du vase ne fait donc aucun doute : il s’agit d’une production du Néolithique Récent II/Chalcolithique, c’est-à-dire des environs de 4300-4200 av. J.-C. En outre, des traces de peinture en or sont discernables en cinq points au moins : trois à l’extérieur et deux à l’intérieur ; l’un de ces derniers semble représenter une ligne perpendiculaire à la lèvre (fig. 6).
Cette découverte est importante à double titre. Tout d’abord, elle sort de son isolement le fragment 2031-001, également décoré à l’or, identifié en 2016. En second lieu, contrairement au fragment 2031-001, nous avons affaire, avec le vase 6163-009, à un objet complet, dont le contexte est parfaitement connu. Les deux seuls autres exemples connus de vases chalcolithiques peints à l’or proviennent de la célèbre nécropole de Varna (Bulgarie), datable des environs de 4600-4500 av. J.-C.
Les analyses isotopiques. - Les analyses isotopiques réalisées sur des restes végétaux et des ossements d’animaux représentent un travail analytique intégré au projet européen (ERC) Agricurb (The agricultural origins of urban civilization, 2013-2017 ; https://agricurb.com/), dont la coordination est assurée par Amy Bogaard, professeure à l’université d’Oxford.
Au total les analyses, de l’isotope stable du carbone (Δ13C) et de l’azote (δ15N), réalisées par Dr. Erika Nitsch, ont porté sur près de 200 échantillons : 73 échantillons de graines carbonisées de céréales ou de légumineuses, prélevés dans des contextes du Néolithique Récent II/Chalcolithique Récent (maison 1 et maison 3 du secteur 6) et sélectionnés par T. Valamoti ; environ 120 échantillons d’ossements, de contextes variés allant du Néolithique Récent au Bronze Récent, sélectionnés par A. Gardeisen. L’objectif de ces analyses est de déterminer les stratégies de gestion des plantes et des animaux durant la préhistoire récente à Dikili Tash, puis de comparer les résultats obtenus avec ceux des autres sites pris en compte dans le programme Agricurb.
Bien que la maison 1 soit représentée par un nombre bien plus considérable d’échantillons que la maison 3, les résultats des analyses sont similaires, ce qui suggère une même gestion des cultures de céréales et de légumineuses (fig. 7). Les valeurs relativement hautes de δ15N dans les échantillons d’orge et de légumineuses indiquent que l’on a probablement utilisé du fumier comme engrais organique. On note également, grâce aux valeurs élevées de Δ13C, une plus forte exposition à l’eau des céréales à Dikili Tash que sur les autres sites, mais on ne parvient pas encore à expliquer ce phénomène. On se demande si l’irrigation est plausible dans le paysage environnant. Par ailleurs, les valeurs de δ15N, plus élevées sur les échantillons d’orge que sur ceux de blé, représentent un phénomène observé sur d’autres sites de Grèce du Nord. Cela est peut-être lié au rôle-clef joué par l’orge dans la nourriture, ce qui nécessitait, ou justifiait, un apport plus important d’engrais.
En ce qui concerne la faune, les herbivores sauvages enregistrent des valeurs de carbone (δ13C) et d’azote (δ15N) plus basses que les animaux domestiques. Cela reflète la différence d’habitat et de pâturage – les uns se déplacent et paissent plus à l’ombre que les autres ; cela est également dû aux apports anthropogènes en azote qui touchent les animaux domestiques. Ce phénomène est observé sur d’autres sites de Grèce du Nord.
La maison 4. - Comme en 2016, deux dossiers architecturaux ont été particulièrement étudiés cette année. Ils touchent deux des édifices néolithiques du secteur 6 : la maison 4, à l’Est (fouilles H. Koukouli-Chryssanthaki 1989-1996), et la maison 1, à l’Ouest (fouilles 2008-2013), respectivement étudiées par Paul Bacoup et Sandra Prévost-Dermarkar.
Dans la maison 4, l’étude s’est concentrée sur les fragments tombés dans la partie Nord-Est de la pièce A. Elle s’intéresse plus particulièrement aux pièces de bois utilisées dans la construction. Ainsi chaque pièce de bois est étudiée selon trois critères : la partie naturelle d’origine, le type de pièce et la fonction architecturale de la pièce.
La technique principale de construction des murs est celle du torchis sur poteaux jointifs. D’après les données disponibles, le faîte des murs devait atteindre une hauteur comprise entre 1,70 et 1,80 m. La terre à bâtir est utilisée de deux manières différentes, comme torchis et comme enduit. Les poteaux sont constitués de rondins ou de perches dont les diamètres sont compris entre 3 et 13 cm et qui ont pu être, ou non, refendus une ou plusieurs fois. Des perches, petites et grosses, sont utilisées en traverses, perpendiculairement aux poteaux (fig. 1).
On situe l’ouverture vers l’extérieur de la pièce A dans le mur Est, en se fondant sur le fait qu’aucun des autres murs dont les bases sont conservées ne présente d’interruption. Cette hypothèse trouve maintenant des arguments dans l’étude des fragments architecturaux. Le fragment 611010-003 fait partie des plus imposants et des mieux conservés avec une hauteur de 53,5 cm et une largeur de 42 cm pour une épaisseur de 10,3 cm (fig. 2). Il appartient probablement au parement externe du mur Est. Il présente neuf empreintes de pièces de bois verticales comme horizontales et deux ensembles d’empreintes de ligatures entre les pièces de bois (fig. 3). Parmi les empreintes, sept sont à orienter plus ou moins verticalement dont six sont des poteaux de l’armature générale de la maison en poteaux jointifs. Les pièces de bois utilisées pour ces poteaux avaient un diamètre originel compris entre 5 et 13 cm. Quant aux pièces de bois horizontales, on a une perche et une pièce équarrie. Un rebord de l’empreinte présente un profil plat et forme un angle franc et presque droit avec la surface plane de l’empreinte. En reconstituant alors les pièces de bois, la pièce équarrie s’apparente rapidement à un linteau reposant d’un côté de l’ouverture sur trois poteaux qui en forment un des jambages.
Cette étude, qui se poursuivra durant les prochaines années, apporte d’ores et déjà une vision plus précise de l’organisation architecturale de la maison 4, notamment l’existence probable d’une étagère ou d’une mezzanine courant tout le long du mur Ouest de la pièce A et permettant d’utiliser l’espace au-dessus du four, pour y ranger du mobilier par exemple, ou pour y dormir (fig. 4).
Un vase de la maison 1 décoré à l’or. - Les études concernant la céramique, coordonnées par D. Malamidou et Z. Tsirtsoni, ont porté d’une part sur les vases décorés au graphite, afin de préparer un projet post-doctoral porté par Silvia Amicone, d’autre part sur les vases de cuisson, en collaboration avec Anastasia Dimoula, dans le cadre du projet PlantCult.
Cependant, en effectuant un nouvel examen du vase 6163-009, dont le relevé graphique ne paraissait pas satisfaisant, D. Malamidou a identifié un vase décoré avec de l’or. Le vase en question (fig. 5), totalement conservé (h. 13,3 cm ; diam. max. 15 cm ; diam. de l’ouverture 12,5 cm), est un bol à profil sinueux, dont les surfaces ont été très altérées par des concrétions et probablement par une exposition au feu. Il comporte deux paires de trous de réparation à différentes hauteurs de la paroi.
Malgré ce mauvais état de conservation, on discerne un décor de triangles curvilignes opposés, peints avec une peinture à base d’oxydes de fer. Ce décor s’apparente à celui des vases « brown-on-cream ». Le vase appartient à un groupe d’objets en place sur le sol de la maison 1 du secteur 6, parmi lesquels figure une amphore intacte décorée au graphite. La date du vase ne fait donc aucun doute : il s’agit d’une production du Néolithique Récent II/Chalcolithique, c’est-à-dire des environs de 4300-4200 av. J.-C. En outre, des traces de peinture en or sont discernables en cinq points au moins : trois à l’extérieur et deux à l’intérieur ; l’un de ces derniers semble représenter une ligne perpendiculaire à la lèvre (fig. 6).
Cette découverte est importante à double titre. Tout d’abord, elle sort de son isolement le fragment 2031-001, également décoré à l’or, identifié en 2016. En second lieu, contrairement au fragment 2031-001, nous avons affaire, avec le vase 6163-009, à un objet complet, dont le contexte est parfaitement connu. Les deux seuls autres exemples connus de vases chalcolithiques peints à l’or proviennent de la célèbre nécropole de Varna (Bulgarie), datable des environs de 4600-4500 av. J.-C.
Les analyses isotopiques. - Les analyses isotopiques réalisées sur des restes végétaux et des ossements d’animaux représentent un travail analytique intégré au projet européen (ERC) Agricurb (The agricultural origins of urban civilization, 2013-2017 ; https://agricurb.com/), dont la coordination est assurée par Amy Bogaard, professeure à l’université d’Oxford.
Au total les analyses, de l’isotope stable du carbone (Δ13C) et de l’azote (δ15N), réalisées par Dr. Erika Nitsch, ont porté sur près de 200 échantillons : 73 échantillons de graines carbonisées de céréales ou de légumineuses, prélevés dans des contextes du Néolithique Récent II/Chalcolithique Récent (maison 1 et maison 3 du secteur 6) et sélectionnés par T. Valamoti ; environ 120 échantillons d’ossements, de contextes variés allant du Néolithique Récent au Bronze Récent, sélectionnés par A. Gardeisen. L’objectif de ces analyses est de déterminer les stratégies de gestion des plantes et des animaux durant la préhistoire récente à Dikili Tash, puis de comparer les résultats obtenus avec ceux des autres sites pris en compte dans le programme Agricurb.
Bien que la maison 1 soit représentée par un nombre bien plus considérable d’échantillons que la maison 3, les résultats des analyses sont similaires, ce qui suggère une même gestion des cultures de céréales et de légumineuses (fig. 7). Les valeurs relativement hautes de δ15N dans les échantillons d’orge et de légumineuses indiquent que l’on a probablement utilisé du fumier comme engrais organique. On note également, grâce aux valeurs élevées de Δ13C, une plus forte exposition à l’eau des céréales à Dikili Tash que sur les autres sites, mais on ne parvient pas encore à expliquer ce phénomène. On se demande si l’irrigation est plausible dans le paysage environnant. Par ailleurs, les valeurs de δ15N, plus élevées sur les échantillons d’orge que sur ceux de blé, représentent un phénomène observé sur d’autres sites de Grèce du Nord. Cela est peut-être lié au rôle-clef joué par l’orge dans la nourriture, ce qui nécessitait, ou justifiait, un apport plus important d’engrais.
En ce qui concerne la faune, les herbivores sauvages enregistrent des valeurs de carbone (δ13C) et d’azote (δ15N) plus basses que les animaux domestiques. Cela reflète la différence d’habitat et de pâturage – les uns se déplacent et paissent plus à l’ombre que les autres ; cela est également dû aux apports anthropogènes en azote qui touchent les animaux domestiques. Ce phénomène est observé sur d’autres sites de Grèce du Nord.
Auteur de la notice
Catherine Bouras
Références bibliographiques
Rapport de mission à Dikili Tash en 2017, remis par P. Darcque et al.
Légende graphique :
localisation de la fouille/de l'opération
localisation du toponyme
polygone du toponyme Chronique
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Date de création
2020-11-24 15:36:32
Dernière modification
2020-11-25 13:27:03
Figure(s)
Fig. 3/ Maison 4, pièce A : reconstitution de l’armature en bois d’une section du mur Est, d’après les empreintes conservées sur le fragment 611010-003
Fig. 6/ Le bol 6163-009, vue de détail : une partie du décor à l’or conservée à l’intérieur de la lèvre [N709-500-avec flèche]