Érétrie. - Fouille E/600 SW - terrain Sandoz - 2012
Informations Générales
Numéro de la notice
2963
Année de l'opération
2012
Chronologie
Mots-clés
Nature de l'opération
Institution(s)
Localisation
Notices et opérations liées
Description
À Érétrie, T. Theurillat, G. Ackermann, M. Duret, T. Saggini et R. Tettamanti (ESAG) rendent compte de la poursuite de la fouille du terrain Sandoz (Fouille E/600 SW) en 2012, sur lequel on avait mis au jour des thermes de l’époque romaine. On y a mis au jour la façade orientale, l’extension Ouest du caldarium, ainsi que les aires de service au Nord. Les sondages de 2012 ont également permis d’explorer les vestiges bien conservés de maisons classiques-hellénistiques en dehors de l’emprise des thermes. Enfin, les fours à chaux découverts lors des précédentes campagnes ont fait l’objet d’une étude attentive pour comprendre leur relation avec les structures thermales.
Thermes romains (milieu IIe s. – seconde moitié du IIIe s. apr. J.‑C.). – Le mur de fermeture du vestibule à l’Est a été entièrement dégagé, complétant ainsi le plan de cette cour carrée à portiques qui donnait accès aux pièces balnéaires (fig. 1-2). Les vestiges en sont toutefois très mal conservés et ne permettent guère de se faire une idée de ce qui devait être la façade principale des thermes. Ce constat tient, d’une part, aux importantes perturbations qu’a subies ce secteur et, d’autre part, au mode de construction du mur, dont l’élévation repose par endroits directement sur les blocs de poros de la maison classique-hellénistique, sans fondation propre. On restitue dans l’angle Nord-Est l’entrée principale des thermes, par laquelle on accédait aux bains à travers la galerie Nord du vestibule. L’entrée n’est marquée que par une simple interruption du mur sur une longueur de près de 3 m.
Durant la campagne 2011, une salle sur hypocauste divisée en deux espaces communiquant, chacun chauffé par un praefurnium, avait été mise au jour (fig 3. : L et C). La logique du plan incitait à restituer, plus à l’Ouest, un troisième espace quadrangulaire symétrique, selon le type bien attesté du caldarium à trois solia. Les fouilles de 2012 ont toutefois révélé une réalité plus complexe. La pièce sur hypocauste mitoyenne au tepidarium (fig. 3 : T) ne fait pas partie intégrante du caldarium, avec lequel elle communique par une étroite porte. On a donc affaire ici à deux espaces intermédiaires entre les salles froides et chaudes : la première tempérée (le tepidarium), tandis que la seconde est directement chauffée par un praefurnium au Nord et pourrait s’identifier à une étuve chaude ou laconicum (L), selon les usages balnéaires des IIe et IIIe siècles apr. J.-C.
Le caldarium est constitué d’une vaste salle quadrangulaire sur hypocauste (25 m2), pourvue d’un bassin au Nord et d’un renfoncement en saillie dans le mur Ouest, l’alveus des thermes. Une chaudière installée sur les piédroits du praefurnium attenant devait alimenter en eau chaude cette cuve peu profonde.
Du second aménagement qui flanquait le caldarium à l’Ouest, il ne subsiste que des vestiges très dégradés : quelques pilettes circulaires et rectangulaires, un angle de murs étroits en assises de briques, ainsi que deux gros blocs de conglomérat formant les piédroits d’un praefurnium (p3). On relève l’usage exclusif de matériaux réfractaires pour les murs, au lieu de l’opus mixtum, ainsi que l’étroitesse de ces derniers, impropre à soutenir une élévation importante. La présence d’un canal de chauffe externe, qui devait supporter une chaudière, et l’absence de cheminées encastrées, suggèrent un dispositif identique à celui du solium Nord. Ces éléments autorisent à restituer dans ce renfoncement quadrangulaire ouvert sur le caldarium par une large baie une alcôve au plafond bas muni d’un bassin sur hypocauste à paroi chauffante. Ce dispositif n’a cependant fonctionné qu’un temps, puisque l’alandier du praefurnium (p3) a par la suite été condamné par un bouchon de moellons et de briques. Cette transformation s’ajoute à celles déjà mises en lumière ailleurs dans les bains : réduction de la piscine du frigidarium, refroidissement du tepidarium et aménagement hydraulique dans le laconicum.
Les pièces hypocaustéesétaient alimentées par trois praefurnia organisés autour d’une vaste cour de service de 85 m2 (S), aménagée au Nord-Ouest des thermes et desservie par la ruelle Ouest. Cette situation facilitait le déchargement du combustible et l’entretien des foyers sans gêner les usagers des bains dont l’accès se faisait à l’extrême opposé. Cet espace semi-enterré était délimité à l’Est par la paroi du frigidarium, au Nord par un mur bahut et à l’Ouest par les substructures d’une maison hellénistique, dont les imposantes fondations mises à nu servaient de mur de soutènement. Le niveau de circulation en terre battue était sans doute protégé des intempéries par des auvents en matériaux légers, dont il ne reste aucun vestige, mais dont on doit supposer l’existence, suggérée peut-être par la présence d’une canalisation le long du mur Nord de l’aire de service évacuant les eaux de ruissèlement vers l’Est. Le praefurnium alimentant le solium à l’Ouest a été aménagé dans un espace très réduit, dont les deux murs qui en fermait l’accès témoignent de son abandon.
Les fours à chaux. - Plusieurs structures circulaires de combustion avaient été fouillées au Nord des thermes en 2010 et interprétées comme des fours à chaux (fig. 6). De dimensions variables, elles présentent des caractéristiques architecturales identiques : banquette intérieure, paroi et voûte en fragments de terre cuite liés à l’argile, alandier soigné en assises de tuiles ou de pierres pour le plus grand. L’étude de l’abondant mobilier accumulé dans leurs aires de chauffe prouve toutefois que ces fours à chaux ne sauraient être postérieurs à l’établissement thermal. On pense donc que le plus grand d’entre eux a probablement produit la chaux ayant servi à la construction des thermes, avant d’être réutilisé comme puits perdu où étaient évacuées par une canalisation les eaux de pluie provenant des aires de service. La découverte d’agrégats de chaux au fond de petits gobelets en céramique invite par ailleurs à supposer d’autres usages pour la chaux fabriquée dans les plus petits fours exhumés près des thermes.
Maisons classiques-hellénistiques (état 2 : IVe-début du Ier s. av. J.-C.). – Sous les niveaux des thermes romains, le dégagement des vestiges d’habitations des époques classique et hellénistique, dont on peut distinguer deux états de construction, s’est poursuivi (fig. 7). La moitié orientale du terrain Sandoz est occupée par deux maisons : l’une au Nord, dont seul le mur de façade Sud est préservé ; l’autre au Sud, la « maison Est ». La partie occidentale du terrain est occupée par la « maison Ouest ». L’installation ultérieure de fours à chaux et des thermes romains ne permet pas de déterminer précisément le lien entre les deux maisons, mais il semble qu’il s’agisse de deux ensembles bien distincts. Les maisons Est et Ouest sont bordées par la rue Est qui relie le Sebasteion au port, la rue Ouest et la rue Nord.
La maison Est présente un plan trapézoïdal formé par le tracé des rues. Elle est accessible sur la rue Est, par une grande porte flanquée de deux bases de piliers (fig. 8 : e). L’entrée donne sur un portique (p), sous lequel différentes structures ont été mises au jour : le fond d’un pithos dans l’angle du couloir étroit formé par l’entrée, un second pithos plus à l’Ouest, ainsi qu’un puits construit en pierres sèches avec une margelle monolithique en calcaire (l. 1,60 m ; larg. 80 m ; haut. 0,16 m ; diamètre de l’ouverture 0,46 m ; profondeur du puits 5, 14 m ; fig. 9), dont l’ouverture était bouchée par un chapiteau dorique en calcaire stuqué. Le remplissage du puits a livré de nombreux fragments de tuiles, d’éléments d’architecture en calcaire stuqué, d’ossements, coquillages et noyaux d’olives et de la céramique de la fin du IIe s.-début du Ier s. av. J.-C. Un sol de galets et deux murets dégagés lors des campagnes précédentes suggèrent que la cour (c) ne se poursuit pas à l’Ouest du puits. Au Sud-Ouest de la cour, une porte donnait accès à deux rangées de pièces au Sud (a et b1-b2).
La maison Ouest, qui se trouve sous les fours à chaux et les thermes romains, est composée de quatre ensembles : une petite cour à péristyle (p) contre sa façade occidentale, une grande pièce à l’Ouest (a) et deux pièces de plan carré au Sud-Ouest (b et c). La cour interne du péristyle (fig. 10 : p) présente un sol en mortier avec une légère déclivité vers le Sud-Est. Une rigole est taillée dans le mur méridional pour permettre l’évacuation des eaux de pluie. Dans l'angle Sud-Est du stylobate a été installé un bloc carré qui porte de fines incisions perpendiculaires, lesquelles auraient pu servir au positionnement d’une colonne ou d’un pilastre. L'interprétation de cet espace comme cour à péristyle est de plus confirmée par la présence d'une petite cloison basse en fragments de tuile qui ne pouvait servir de mur porteur. Le sol de la galerie orientale est en terre battue percée par deux petites fosses. À l’Ouest de la cour, une porte permettait d’accéder à une vaste pièce (a) dont les limites Nord, Est et Ouest ne sont pas connues. Cet espace, mesurant au moins 4,50 m sur 5,00 m, a livré un premier sol en mortier très fin et régulier et un second contenant de petits galets et des éclats de taille liés dans un mortier moins fin. Dans l'angle Nord-Est de la pièce a été dégagée une structure circulaire dont il ne reste que le négatif. La présence de cet aménagement, probablement une cuve ou un bassin, suggère une vocation artisanale de cet espace. Les sols sont en partie recouverts par une couche de préparation de mortier grossier et percés par deux fosses. L’ensemble des murs et des sols dégagés (p et a) était recouvert d’une couche de destruction de toiture épaisse de 30 à 40 cm contenant des tuiles dans sa partie inférieure et de la cendre presque pure dans sa partie supérieure. L’abondant mobilier céramique mis au jour permet de situer cette destruction par incendie au début du Ier siècle av. J.-C. Plus au Sud se dessinent deux pièces (b et c). Le mur de façade occidental a livré, au niveau du ressaut de fondation entre les blocs de conglomérat et l’assise de calcaire, deux entailles profondes d'une dizaine de centimètres et longues de 5,25 m (pièce b) et de 4,80 m (pièce c). Ces dernières correspondent à des niveaux de sol et permettent donc de restituer deux pièces en enfilade du Nord au Sud. L'exploration en profondeur de ce secteur a permis de dégager les fondations d'un mur en limite méridionale de la fouille et deux blocs de fondation qui viennent confirmer le plan de ces deux pièces.
Les murs de ces deux maisons sont constitués d’une fondation de blocs quadrangulaires en poros et d’un socle composé d’une assise de blocs de calcaire polygonaux avec de petits moellons ajustés en bouchage. Ce type d’appareil soigné peut être daté du IVe siècle av. J.-C.
La fouille profonde d’un praefurnium des thermes au Sud-Ouest de la fouille a livré une couche d’éclats de calcaire probablement liés aux travaux de construction de la maison Ouest. Le mobilier céramique de ce niveau peut être situé dans la seconde moitié du Ve siècle av. J.-C., assurant la datation du chantier avant le début de l’époque hellénistique. Ces maisons sont occupées jusqu’au début du Ier siècle av. J.‑C., comme l’atteste l’abondante céramique découverte dans leurs niveaux de destruction.
Maison classique (état 1, Ve–début du IVe siècle av. J.‑C.). – La fouille des vestiges remontant à la haute époque classique, sous les maisons hellénistiques Est et Ouest s’est poursuivie. Cet état de construction a été presque entièrement détruit par les grandes habitations du IVe siècle et constitue le précieux témoin d'une période d'occupation encore méconnue à Érétrie, et plus particulièrement dans les environs du terrain Sandoz. Dans l’angle Sud-Est du vestibule des thermes (V), la fouille des structures mises au jour en 2011 a été poursuivie sur quelques dizaines de centimètres sans livrer de matériel permettant d'en préciser la datation. Un mur supplémentaire marque un retour vers le Sud de M121 et présente le même appareil. Un autre mur de pierres sèches est apparu plus à l’Est lors du dégagement de la fosse d’alandier du grand four à chaux romain. Ce mur semble appartenir au même état de construction que les quelques vestiges dégagés plus à l’Est, mais présente une orientation différente.
Occupation pré-classique. – Les décapages profonds dans l’aire de service des thermes ont mis au jour un alignement de gros blocs de calcaire non équarris, présentant un parement vers le Sud. Conservée sur un peu plus de 2 m de longueur, la structure est détruite par l’alandier des thermes et par une fosse de la basse époque hellénistique, ce qui limite la compréhension de son plan et de sa fonction. Aucun niveau ni matériel associé n’a pu être mis en évidence, mais son mode de construction et son niveau d’implantation dans les sables et graviers invitent à la rattacher à un horizon pré-classique.
Auteur de la notice
Catherine Bouras
Références bibliographiques
D’après le rapport d’activités de l’ESAG à Érétrie en 2012, remis par T. Theurillat, G. Ackermann, M. Duret, T. Saggini et R. Tettamanti.
Légende graphique :
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Date de création
2013-03-07 00:00:00
Dernière modification
2023-10-11 11:42:56
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