RHODES. – Ville - 1990
Deutsches Archäologisches Institut (DAI) (Institut archéologique allemand)
4η Εφορεία Βυζαντινών Αρχαιοτήτων (4e éphorie des antiquités byzantines)
Rodos, Rhodes
Une soixantaine de sondages d'urgence ont été effectués, en 1989-90, par le Service archéologique (XXIIe Éphorie des Antiquités préhistoriques et classiques, 4e Éphorie des Antiquités byzantines), apportant de nouvelles bribes d'information sur la ville antique (mur d'enceinte, réseau des rues, constructions hellénistiques et romaines, nécropoles) ainsi que sur la ville médiévale. Nous ne retiendrons que les éléments essentiels, puisés dans les rapports détaillés de l'AD 44 (1989) [1995] B'2, p. 472-498, 510-520 et AD 45 (1990) [1995] B'2, p. 467-493, 507-514 [A. Dréliossi, V. Patsiada, M. Filimonos, S. Karapanou, Ch. Kantzia, E. Kaninia, E. Apostolou, S. Évagélinidis, E. Skerlou, M. Salta ; Th. Archontopoulos, A.-M. Kasdagli, E. Papavassiliou].
Rempart antique. — Dans le quartier de Psaropoula, un petit tronçon du rempart Ouest a été dégagé. On a poursuivi, d'autre part, dans le terrain A.B.E.T.E.-K. Kostaridi, la fouille du segment du rempart Est et du grand collecteur voûté précédemment découverts (v. BCH 119 [1995] Chron., p. 1009) ; à cet endroit, une construction rectangulaire tardive contenant un amas d'ossements humains et une épaisse couche de tessons s'adossait au parement Nord du rempart, tandis qu'à l'extérieur de ce dernier des sondages ont eu le mérite de révéler des traces d'occupation humaine antérieures à la fondation de la ville. Dans le secteur Sud (rue S. Kazouli), un puissant mur orienté Sud-Ouest/Nord-Est, qui a toute chance d'être le rempart classique, a été suivi sur 13 m de long. À l'extrémité Sud-Est de la ville, enfin (terrain Kassapidi), on a dégagé, sur une longueur légèrement supérieure, un mur en poros de 3,70 m d'épaisseur orienté Nord-Sud, qui pourrait lui aussi faire partie de l'enceinte, bien qu'il passe plus à l'Ouest que le tracé attendu.
Rues. — Une quinzaine d'artères déjà connues — d'orientation Nord-Sud (P la, lb, 26, 29a, 27, 30, 31, 32, 33b) ou Est-Ouest (P 5, 10, 11, 12, 13, 15, 17, 19, 29a, 38) — ont été recoupées, et le croisement de deux d'entre elles (P 5 et P 27) partiellement fouillé dans un terrain situé à l'angle des rues Sophouli et Pindou, dans le secteur Ouest (fig. 1).
On a aussi mis au jour, dans le secteur Sud, à l'angle des rues Mégalou Konstantinou et Garibaldi, une nouvelle rue Nord-Sud, qui a reçu le n° P 31b ; située entre les rues P 30 et P 31, qui suivent respectivement les axes des rues Kazouli et Mégalou Konstantinou, elle fut utilisée jusqu'à l'époque paléochrétienne. Tout près de là, on a localisé la limite Nord-Est de la rue périphérique P 40, qui coupe obliquement les axes de la ville et suit le tracé du rempart, distant de 30 m.
Dans le sondage qui a recoupé la rue P 19, à l'extrémité Sud de la ville, on note la présence d'un conduit d'adduction pourvu d'un système de décantation : la canalisation traverse par le milieu des vases à panse ovoïde disposés verticalement (fig. 2).
Constructions hellénistiques et romaines. — Parmi les nombreux vestiges de construction découverts dans les divers secteurs de la ville, certains méritent une mention particulière.
1) Secteur Nord. — Dans un terrain de la rue Amarantou, près duquel on avait naguère recueilli des indices suggérant l'existence d'un sanctuaire — bases de statues en bronze, stèle inscrite avec liste de noms, signalée dans BCH 112 (1988) Chron., p. 678, inscriptions honorifiques dont l'une mentionne un prêtre de Sarapis, d'Agathe Tychè et de Daimôn Agathos — , on a mis au jour deux tronçons de murs monumentaux en poros dont la construction est datée de la fin du IVe s. ou du début du IIIe s. av. J.-C., et qui furent endommagés par des remaniements ultérieurs. Tout indique qu'il s'agit d'un édifice public. La fouille de ce terrain a notamment livré des fragments de statues en bronze (une tête masculine incomplète, des doigts, des plis de vêtements).
2) Secteur Ouest. — La poursuite de la fouille au carrefour des rues Cheimarras et Enoplôn Dynantéôn (v. BCH 118 [1994] Chron., p. 802), sur le flanc Est de l'acropole, a mis au jour, d'une part, les restes d'une nouvelle fonderie (v. ibid.), avec sa fosse de coulée piriforme taillée dans le rocher ; d'autre part, ceux d'un ensemble de bâtiments de la fin de l'époque hellénistique et du début de l'époque romaine, comportant notamment une grande pièce (10,20 x 7,90 m) pavée, à l'origine, d'une mosaïque combinant l'opus tessellatum et l'opus vermiculatum, puis, plus tard, d'un opus sectile en marbre polychrome ; enfin, les vestiges d'un important complexe thermal avec hypocauste, puits d'aération maçonné et canalisations. Parmi le matériel recueilli on mentionne une monnaie d'or de l'empereur Honorius (395-408 ap. J.-C.).
Dans deux autres terrains du secteur Ouest, le dégagement de vestiges architecturaux a amené la découverte de cinq inscriptions. La première, trouvée dans le terrain N. Mylonas (v. BCH 119 [1995] Chron., p. 1008), à côté d'un mur formant une longue base construite qui supportait des offrandes et des stèles, est une inscription de 13 lignes gravée sur la base d'une statue d'un athlète rhodien jusqu'alors inconnu, Πυθίων Κλευφανεύς, vainqueur aux Ἁλίεια ainsi que dans des concours panhelléniques. Les quatre autres étaient remployées dans un mur paléochrétien découvert tout près de là, dans le terrain Kyprioti-Noun. Deux d'entre elles proviennent d'une exèdre semi-circulaire sur laquelle se dressaient les statues de deux athlètes : Philophron Archinomou, vainqueur aux Jeux isthmiques, et Astymédès, vainqueur aux Jeux néméens. C'est de cette exèdre que doit provenir la base de la statue du vainqueur aux concours olympiques -ων Ἀστυμήδευ[ς, déjà publiée (Bull. ép. [1979], 309 = SEG XXVIII 688). On aurait alors affaire à un groupe de trois athlètes appartenant à la même famille : Φιλόφρων Ἀρχινόμου | Ἀστυμήδης [Φιλόφρονος] | [Φιλόφρ]ων Ἀστυμήδευς. Il s'agit d'une riche famille de Lindos qui a offert ce monument pendant la seconde moitié du ΙΙIe s. av. J.-C.
3) Secteur Sud. — La découverte la plus intéressante, faite à l'angle des rues Aghias Anastassias et Palaiôn Patrôn Germanou, est celle d'un portique à double colonnade, situé dans le prolongement d'un édifice public identifié comme le gymnase de la ville hellénistique (v. BCH 112 [1988] Chron., p. 678). De la colonnade intérieure on a retrouvé en place trois bases carrées complètes (1,50 x 1,50 m) et deux autres partiellement conservées, tandis que le stylobate de la colonnade extérieure, ouverte vers la cour du bâtiment, a été dégagé sur 17,10 m de long.
Tombes et nécropoles. — Les sondages pratiqués dans une vingtaine de terrains situés dans la zone des nécropoles, qui s'étendait au-delà de l'enceinte urbaine, au Sud, ont mis au jour une multitude de tombes de types divers, dont la chronologie s'échelonne entre le IVe s. av. J.-C. et la fin de l'époque romaine : simples fosses, cistes construites ou taillées dans le rocher, tombes à chambre — elles aussi taillées ou construites — , tombes à ouverture latérale creusées dans les parois rocheuses verticales, constructions funéraires monumentales (fig. 3), réceptacles abritant des vases cinéraires et/ou des ostéothèques sur lesquelles le nom des défunts est parfois inscrit. Ces tombes étaient parfois regroupées dans des périboles. Certaines d'entre elles ont livré un riche mobilier, qui comprend notamment des strigiles (fig. 4), des vases en argent, des bijoux en or (fig. 5) et en argent, des miroirs en bronze, des pyxides — dont plusieurs contenaient encore du fard — , des monnaies, des statuettes en terre cuite (fig. 6), des vases à figures rouges, etc. (fig. 7). Parmi les trouvailles on mentionne aussi plusieurs blocs sculptés, dont une stèle en poros enduite et décorée d'une pomme de pin en relief et un autel dont le décor combine des guirlandes, des bucranes et une scène de banquet funéraire (lers. av. J.-C.).
Hors de la zone des nécropoles, on signale la découverte de deux tombes en pleine terre, d'une kalpè hellénistique et d'une sépulture d'animal (peut-être un chien) sur le quai Miaouli, dans le quartier de Psaropoula. Il semble donc que cet espace, situé à l'extérieur du rempart, fut utilisé occasionnellement, à partir de la fin de l'époque hellénistique, pour des sépultures rudimentaires.
Ville médiévale. — Des neuf fouilles menées par la 4e Éphorie des Antiquités byzantines, on retiendra surtout celle du terrain F. Pekmentzi, qui a mis au jour, rue Agésandrou, les vestiges d'une basilique paléochrétienne avec baptistère, recouverts, vers la fin du ΧΙIe s., par une petite église en croix libre décorée de peintures murales et entourée d'un cimetière, dont plusieurs tombes ont livré un riche matériel. Des vestiges de construction du VIe s. mis au jour, dans l'angle Nord-Est du terrain, au-dessus des ruines de la basilique, fournissent un terminus post quem pour la réoccupation de l'espace et la construction du rempart byzantin, dont un segment long de 6 m est conservé dans ce terrain, sur toute sa hauteur, renforcé par une tour haute de 8 m.
Le rempart Sud du Collachium byzantin a été recoupé dans un terrain riverain de la rue Panaitiou, où l'on a aussi dégagé la façade d'une demeure de la période des Chevaliers (écusson de Pierre Culant, contemporain du Grand Maître Hérédia, 1377-1396) et un bâtiment du XVe s. remanié à la fin de la turcocratie.
Des travaux effectués au 6, rue Gavala, dans la grande salle du rez-de-chaussée d'un bâtiment de l'époque des Chevaliers, ont amené la découverte de peintures murales de la fin du XVe s. ; l'une d'elles représente la ville fortifiée de Rhodes, dont une tour du rempart Sud porte l'écusson du Grand Maître Pierre d'Aubusson (1476-1503).
Signalons pour finir la publication, par J. Blackman, P. Knoblauch et A. Yiannikouri, des abris à bateaux du port de Mandraki.
AA (1996), p. 371-426.
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