KOS. - Ville et ses abords - 1987
Âge du Bronze - Bronze Ancien - Bronze Moyen - Bronze Récent
Âge du Fer - Protogéométrique - Géométrique
Antiquité - Archaïque - Classique - Hellénistique - Romaine
Kos
On trouve dans l'ArchDelt 42 (1987) [1992], B'2, p. 620-651, un compte rendu des quarante-sept fouilles effectuées sur l'île en 1987 par la XXIIe ΕΠΚΑ, pour la grande majorité d'entre elles dans la ville de Kos et sa banlieue immédiate. Les résultats peuvent en être résumés comme suit :
KOS (VILLE)
Séraghia. — On signale dans le quartier de Chalvazia la découverte d'un stylobate orienté Est-Ouest, sur un terrain où ont été également dégagés divers murs mycéniens, MR IA et MR IB, d'interprétation malaisée (terrain Vavla). Un dallage, limité par un mur en appareil pseudo-isodome, datait de l'époque archaïque ; le niveau archaïque a livré de nombreux fragments de simas archaïques en terre cuite ; dans la couche mycénienne avait été creusée une tombe protogéométrique en pithos ; sous quelques vestiges mal conservés de l'habitat mycénien et minoen, on a mis au jour un tronçon de la muraille du Bronze Ancien III, orienté NO/SE (fig. 112) (terrain Ghérovassili-Saroukou).
Des vestiges de bâtiments attestant une occupation allant du MM à l'époque impériale mis au jour sur le terrain Mouzaki, nous retiendrons : — le carrefour de deux rues hellénistiques, avec chaussées de terre sableuse et collecteur central – elles formaient un angle aigu qui ne respecte pas l'orientation de la trame hippodamienne de la ville, dans laquelle n'était probablement pas incluse la colline de Séraghia –, à proximité d'une tombe à ciste protogéométrique proche des restes d'un bûcher et d'un mur épais dont on a dégagé une porte et dont la tranchée était remplie de céramique hellénistique (peut-être un tronçon du rempart dont Alcibiade entoura Kos-Méropis à la fin de la guerre du Péloponnèse) ; — les vestiges de l'habitat mycénien et minoen, comprenant, sous la couche de destruction de la fin du MR IA, un sol argileux sur lequel on a recueilli plusieurs vases, ainsi que le crâne d'une des victimes du tremblement de terre qui précéda l'éruption. La couche de cendres volcaniques, épaisse de 0,10-0,20 m, a été dégagée en plusieurs endroits.
Plusieurs couches d'occupation mycénienne ont été mises au jour dans la région de l'acropole (terrain Koukouna), ainsi qu'une rue minoenne, orientée Nord-Sud, dont les chaussées successives étaient constituées de terre battue, gravier et tessons pour les plus récentes, et de dallage et pavement pour les plus anciennes, qui semble avoir été en usage jusqu'au MR IIIC ; elle était bordée à l'Est par un bâtiment dont on a dégagé trois pièces et deux entrées. Des vestiges abîmés de l'habitat mycénien ont également été fouillés sur la pente Nord de la colline de Séraghia.
Au Sud-Ouest de l'église Ste-Paraskévi, près de la « maison d'Asklépios » fouillée en 1973 par les Italiens, on a découvert une rue antique et une maison paléochrétienne, pavée dans son dernier état d'une mosaïque avec canthares et oiseaux.
Centre de la ville. — Nous illustrons (fig. 113) l'angle Sud-Est de la krépis du temple de Déméter, en blocs de travertin remarquablement taillés reposant sur une fondation en calcaire et poros (terrain Tsoulpha) : le bâtiment, dont on est désormais en mesure de restituer approximativement les dimensions (6,50 x 24 m), fondé dans une couche livrant une céramique et des figurines archaïques, a été construit au début de l'époque classique ; la présence de céramique mycénienne et minoenne atteste l'ancienneté du culte ; contre l'angle Sud-Est du temple, un dépôt contenait de très nombreuses amphores locales à fond pointu, de la fin de l'époque hellénistique, qu'il faut peut-être mettre en relation avec la présence de la fontaine découverte par R. Herzog. Parmi le matériel recueilli, on retiendra un fragment de figurine chypriote. Des couches contenant de la céramique archaïque, des perles, des fragments de figurines et de nombreux ossements d'animaux, reposant sur une couche mycénienne, permettent de rattacher le terrain voisin au même sanctuaire.
Une rue orientée Est-Ouest était bordée par deux bâtiments pavés de mosaïques, datant du Bas-Empire (terrains Délighianni-Balani) (fig. 114). Le long de la rue, large de 4,50-5 m, couraient une canalisation et un égout, à couverture de plaques. Du bâtiment Nord, on a dégagé huit pièces, réparties autour d'un espace central avec mosaïque (fig. 115). Le personnage féminin (fig. 116), représenté au centre d'un octogone, pourrait être une personnification de Kos. À l'entrée est conservée la dernière ligne d'une inscription (ΦΙΛΟΚΑΛΕ). Le reste de la mosaïque dessine des motifs géométriques (motifs à quatre feuilles, écailles, carrés avec croix...); l'ensemble est encadré par une guirlande de lierre. Les pièces tout autour au Nord avaient soit un dallage de terre cuite, soit une mosaïque. Le bâtiment Sud comprenait quatre pièces pavées de mosaïques. Les divers états des deux bâtiments datent d'entre le IVe et le VIIe s. ap. J.-C. On signale un nouveau tronçon de la 3e rue Nord-Sud qui passe à l'Est de l'agora sur le terrain Diamantopoulou. Une autre rue, orientée NO/SE, passait au Sud de l'agora (terrain de l'Hôpital; cf. BCH 111 [1987], Chron., p. 570); au Sud de la rue, les vestiges mal conservés d'une maison dataient du Bas-Empire et de l'époque paléochrétienne.
D'importants vestiges de la partie Sud-Est de l'agora ont été dégagés sur le terrain Damtsa, situé au Nord du temple dorique et de l'autel de Dionysos : l'abondance des couches d'éclats de taille de marbre laissent supposer que les blocs des édifices de la place ont été entièrement récupérés et retaillés à l'époque des Chevaliers. Au centre et à l'Ouest du terrain, de très nombreux blocs provenaient du portique oriental. On a mis au jour : — un tronçon de la rue de 8,80 m de large longeant l'agora à l'Est, en usage de l'époque hellénistique à l'époque médiévale ; — une entrée monumentale du côté Est, à cinq degrés ; — le portique oriental, en grande partie démonté : sur le stylobate étaient entassés nombre de fragments architecturaux ; cinq blocs de la krépis portaient des marques de maçon (ΑΘ) ; il semble que le bâtiment ait été démoli par un séisme, avant d'être exploité par les Chevaliers ; — la cour intérieure : elle comprenait un grand édifice circulaire de 17 m de diamètre, à deux murs concentriques (fig. 117), construit sur un podium rectangulaire de 27 x 22 m (peut-être une tholos romaine?); — à l'arrière du portique, au Nord de la rue, un atelier de la fin de l'époque hellénistique-début du Haut-Empire (fig. 118), fabriquant des pigments, dont la publication a déjà été signalée dans le BCH 116 (1992), Chron., p. 932 — un foyer (fig. 119), a livré une centaine de boules (de la taille d'une noix) de bleu égyptien ; un petit trésor d'objets métalliques (statuettes – dont une remarquable protomè en bronze de Caligula – et monnaies) a été recueilli dans une pièce au Sud de la rue. Il semble désormais que la longueur de l'agora hellénistique puisse être estimée à 330 m ; la rue passant au Sud, large de 33 m, serait la plus large de la ville, la rue principale qui servait probablement de voie des processions partant de l'agora pour se diriger vers l'Asklépieion.
Au Sud-Est du temple et de l'autel de Dionysos (terrain Kassiôti), sous des vestiges d'époque italienne et turque, on a mis au jour une rue hellénistique (probablement le prolongement de la 2e rue, également dégagée dans le terrain Tsocha voisin), avec collecteur central, utilisée du début de l'époque hellénistique à l'époque paléochrétienne, sous laquelle des dépôts plus anciens contenaient des fragments d'amphores de Kos du IVe s. av. J.-C. ; elle était bordée à l'Est par une maison à sept pièces, dont les murs étaient couverts d'enduits à décor peint; construite à l'époque hellénistique, elle fut habitée jusqu'à l'époque paléochrétienne, avant d'être détruite par un incendie.
Un mur en opus caementicium soutenait vraisemblablement une voûte des Thermes Nord (terrain Mavrou).
On signale sur le terrain Patakou la découverte d'un segment de la jetée occidentale du port antique. Des magasins et réserves appartenant aux installations portuaires ont été mis au jour en bord de mer (terrain Stamatiadi). Ils datent de la fin de l'existence de la ville (VIIe s. ap. J.-C). Des bâtiments romains, probablement d'autres magasins du port, étaient fondés sur les murs des arsenaux hellénistiques (terrain de la Caisse du Port) : huit môles parallèles, orientés SO/NE, délimitaient des loges, dont on estime actuellement la longueur à 45-50 m. Sur les môles, qui ont une pente de 10°, s'encastraient les poutres sur lesquelles on tirait les navires [voir la reconstitution (fig. 120)]. Parmi les blocs remployés dans des murs plus récents, on a retiré une statue fragmentaire d'Aphrodite anadyomène, d'un type rare. Les arsenaux reposaient sur une couche dont la céramique date du IIIe s. av. J.-C.
Secteur Est de la ville. — Au Nord d'une pièce appartenant à une maison romaine, pavée de mosaïque, on a mis au jour l'opus sectile (fig. 121) (terrain Avakoumidi). Les sols de mosaïques ou d'opus sectile, plus ou moins bien conservés, de plusieurs bâtiments d'époque paléochrétienne, pour la plupart longés par des rues, ont été dégagés dans ce secteur (terrain Platanista, terrain Guika, terrain Kassani) ; la réserve de l'un d'eux abritait des pithoi, dont l'un portait sur la lèvre la signature de son fabricant : Εισίων έποει ; l'une des maisons disposait d'une réserve souterraine, sur le sol de laquelle la céramique datait du VIe-VIIe s. ap. J.-C. ; elle avait ultérieurement servi de tombe à un homme, une femme et un nouveau-né. De nombreux fragments d'enduit peint à décor architectural provenant de bâtiments hellénistiques ont été recueillis.
On signale sur le terrain Koukouva la découverte d'une nouvelle rue Est-Ouest, à proximité d'une pièce avec pilettes d'hypocauste in situ.
Secteur Ouest de la ville. — On a mis au jour sur deux terrains des vestiges du gymnase : stylobate du portique occidental, en blocs de poros, dont seules les fondations sont conservées (terrain Papakonslanlinou) ; murs de fond du portique occidental (terrain Bakaloglou).
La partie Sud d'un grand édifice public, dont l'orientation est différente de celle du gymnase, avec une cour centrale, a été fouillée au Sud de ce dernier (terrain Svourénou) (fig. 122) : deux tambours de colonnes en place sur le stylobate portaient des encoches destinées à maintenir une balustrade; à l'intérieur du bâtiment, quatre pièces, ouvertes sur la cour, étaient séparées par des murs longs de 4,10-4,20 m, au Sud desquels quatre blocs servaient de base aux piliers soutenant la toiture. La céramique recueillie date de la fin de l'époque hellénistique et du Haut-Empire. On n'est pas encore en mesure de définir la fonction de ce bâtiment.
Quatre outils de labourage en fer, en excellent état de conservation, ont été trouvés parmi des vestiges architecturaux de la fin de l'époque hellénistique-début du Haut-Empire (terrain Malamaténi).
À Haghia Triada, à l'Est du théâtre hellénistique, un bâtiment du Bas-Empire avait conservé un carrelage de terre cuite et des fragments de mosaïque.
Fortification Ouest. — Un puissant mur de poros, large d'environ 1 m, constituait le prolongement d'un mur de soutènement situé à 22 m à l'Ouest du rempart, déjà connu à Marmarôto. Il avait été construit dans un secteur précédemment occupé par une nécropole. Correspondant à ses deux assises inférieures, un remblai a livré des tessons de céramique utilitaire de la fin de l'époque hellénistique et du Haut-Empire, ainsi que les déchets d'un atelier céramique, attestant l'existence d'installations artisanales dans ce secteur de la ville. Une rue plus récente, postérieure à la destruction de l'enceinte, le longeait à l'Ouest, menant vers les nécropoles et les habitations tardives.
Fortification Sud. — Le tracé du rempart antique, entièrement démonté, a été repéré sur deux terrains à Ambavris. Le remblai contenait la céramique romaine habituelle.
Nécropoles. — À Marmarôto, on a mis au jour, à l'intérieur et autour d'un monument funéraire carré, avec enclos, d'époque romaine (Ier-IIIe s. ap. J.-C), onze tombes à ciste et une tombe à incinération. Le sol de la chambre (7 x 7 m) était couvert d'enduit rouge. Autour des tombes de la chambre, une banquette basse avait conservé des traces d'opus sectile. À proximité d'une base plaquée de marbre, proche du mur occidental, trois statues s'étaient brisées en tombant sur le sol : le personnage masculin drapé (fig. 123), un jeune garçon nu et l'enfant vêtu d'un chiton court, tenant une œnochoè (fig. 124). L'une des femmes ensevelies à l'extérieur du monument portait une couronne et des boucles d'oreille en or. Entre les tombes, une sépulture enfantine était recouverte par une stèle, portant l'inscription Τέκνον το χρυσέ|ρωτος ένθα νήπι|ον ομώνυμον πα|τρός με τύμβος | αμφέχει. Dix autres stèles avaient été rassemblées au Nord de la chambre funéraire.
Une partie de la nécropole archaïco-classique a d'autre part été dégagée sur le terrain Oikonomou : 90 tombes (38 d'enfants et 52 d'adultes), de types divers (sarcophages en terre cuite, tombes à ciste, tombes à incinération, sépultures en jarre), disposées en rangs serrés et superposés. Les tombes les plus anciennes, à incinération pour les adultes, sont identiques à celles de Rhodes. La nécropole, entourée d'un enclos, fut utilisée dès l'abandon de la nécropole géométrique de Séraghia, comme en témoignent les tombes du Géométrique Récent et subgéométriques. Du mobilier, nous illustrons (fig. 125) les fragments d'une coupe à figures noires signée du potier Tlèsôn, fils de Néarchos.
On signale d'autre part la découverte à Platani, en 1985, de dix tombes à ciste mal conservées datant du Ier-IIe s. ap. J.-C, dans le secteur de l'Asklépieion, en 1986, de deux tombes à ciste hellénistiques, à Panaghia Syntriani, de trois tombes à ciste hellénistiques, à Vourina, de deux tombes à ciste hellénistiques.
Les collections du musée de Kos ont été enrichies de diverses trouvailles fortuites, dont nous retiendrons une bande de plomb inscrite, très bien conservée, trouvée à l'Ouest de l'autel de Dionysos par un touriste : il s'agit d'une bandelette d'imprécation, portant un texte de plusieurs lignes qui se poursuit sur la face arrière, sur laquelle est également gravée une représentation du démon zoomorphe Seth, transperçant de son épée Hermias enchaîné. La scène est encadrée de symboles magiques et de mots incompréhensibles. Un habitant d'Antimacheia a pour sa part apporté au musée un remarquable tétradrachme « au discobole » en argent de Kos.
Signalons la publication de l'ouvrage de K. Höghammar, Sculpture and Society. A study of the connection between free-standing sculpture and society on Kos in the Hellenistic and Augustan periods, Boreas. Uppsala Studies in Ancient Mediterranean and Near Eastern Civilizations 23 (1993), où l'auteur étudie le contexte historique et économique, les inscriptions se référant à des statues ou gravées sur les bases des statues, ainsi que leur provenance et le matériau utilisé.
On dispose désormais, dans l'ouvrage de M. Segre, Iscrizioni di Cos, Monografie della Scuola archeologica di Atene e delle Missioni italiane in Oriente VI (1993), du catalogue présentant le texte des inscriptions de Kos réunies par l'auteur et conservées au château des Chevaliers de Jérusalem.
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